Relecture de l’Hamlet de Shakespeare, le texte Hamlet-Machine de Heiner Müller s’inscrit dans un contexte historique où se dessine l’échec du rêve de la révolution et du communisme. Hamlet et Ophélie sont plongés dans notre société glaciaire, marchande et médiatique, sans repères, sans utopie. Hamlet, ici, est l’image d’un être qui, dans l’impossibilité d’agir, d’être soi, chercherait à s’effacer. Rejetant toute expérience collective, il se réfugie face aux écrans, à l’intérieur de son propre corps, aspirant à devenir une machine sans douleur ni pensée.
Par l’extrême liberté dont fait preuve Heiner Müller dans son écriture, il a ouvert l’horizon d’un théâtre à venir. Hamlet-Machine est une pièce énigmatique. Elle est si dense qu’elle semble contenir un secret sur l’être, le politique et leur devenir. Dans les différentes mises en scènes réalisées de la pièce, les spectateurs étaient partie intégrante de la création en interagissant dans le temps de la représentation. Ils pouvaient ainsi expérimenter la matière très particulière de cette écriture et interroger son sens qui scintille sans cesse différemment selon les contextes.
La communauté inavouable explore cette pièce à travers plusieurs langages artistiques depuis plus de dix ans. Cette recherche a donné lieu à trois mises en scène différentes en 2001, 2002 et 2004. En 2002 a été créé en collaboration avec Agnès de Cayeux un site internet en interrelation avec le public. En 2003, l’installation Un musée (de théâtre) inspirée de Hamlet-machine a été créée à Freiburg en Allemagne avant d’être reprise depuis 2009. En 2004, à l’issue de la dernière version scénique de la pièce, des articles de réflexion ont été commandés à des chercheurs et écrits par Clyde Chabot.
Nous percevons ce texte comme un outil permettant de sonder l’être collectif à travers les époques et en fonction du contexte politique. Après avoir développé une recherche en France dans le temps entre 2000 et 2004, s’est entamée depuis 2009 une recherche dans l’espace, sur différents continents.